dimanche 26 décembre 2010

La naissance du N°19

Les parfums Chanel avaient une formule magique: attaque d’aldéhydes, coeur floral abstrait (un fleur souveraine et sa cou de suivantes, Jasmin impérial pour le 5, reine Rose pour le 22) et fond sensuel propre un peu savonneux-poudré. Les lancement s'étaient ralenti et même arreté pour ne pas mettre en péril le pilier de la marque. Les Wertheimer avaient même hésité à autoriser le retour de Gabrielle à la mode de peur qu'un échec ne fasse de l'ombre au célébrissime N°5. Le vieux Wertheimer ne voulait pas entendre parler d'un nouveau parfum et aurait dit "de mon vivant, jamais!" Gabrielle, vieux chameau increvable, têtue comme pas deux, l'a pris au mot et à patiemment élaborer sa formule d'un parfum jeune selon ses critères et lui a donné sa date de naissance: N°19.

L'attaque typiquement Chanel se fait non plus avec des aldéhydes, mais avec du galbanum, vert et cinglant, profondément incisif et guerrier. Ce départ me fait toujours penser à la naissance d'Athéna, sortant du crâne de Zeus armée de pied en cap, prête à en découdre, attitude très Mademoiselle Chanel quand on y pense. En fleur souveraine, un très bel Iris s'avance encadré d'une garde rapprochée de nymphes fleuries, vertes, austères, qui maintiennent l'iris loin de la douceur: il se poudre à peine, allant plutôt vers le soyeux contenu, s'épanouissant finalement sur un élégant fond de bois qu'on hésite à qualifier de sensuel dans ce contexte.

Effectivement, ce parfum-là pourrait être celui d'une déesse vierge  qui abrite sa beauté sous une métallique égide, au beau visage sourcilleux, fière de sa beauté, régnant sur l'intelligence et l'industrie, mais prête à déclencher des guerres si son immense beauté n'est pas reconnue. ça colle bien avec le personnage Chanel dans sa dernière incarnation, la plus mademoiselle, engageant la bataille contre le New Look qui avait remis à l'honneur les potiches. Alors que N°5 la montrait sensuelle et le N°22 sentimentale sous l'influence du grand duc Dimitri, mais le 19 a complètement oublié la passion, les errements de jeunesse, le passé de femme entretenue pour une dureté toute cérébrale qui ne le rend pas forcément sympathique au premier abord. Comme Paris devant donner la pomme, certains lui préfèrent des beautés plus sensuelles ou plus souriantes. Son discours n’est pas exactement rigolo ou séduisant, mais sa façon de convaincre plutôt que plaire peut en faire un formidable allié.



Il s'est récemment réincarné chez Serge Lutens qui en propose une nouvelle interprétation avec son Bas de Soie. Une même attaque de galbanum et un même iris pareillement soyeux mais qui ici se fait voler la vedette par un premier temps par l'une de ses suivante: la princesse Jacinthe, dans sa version verte, débarrassée de ses aspects les plus fleuris sucrés qui fait perdurer encore un peu plus l'attaque. Une jolie variation, plus dépouillée, avec en fond, une petite touche moderne crissante, mais un peu décevante pour une création Lutens. Moins riche, cette variation est au N°19 ce que l'Eau Première est au N°5: intéressante car révélant d'autres aspects mais au final ne valant pas la complexité riche de l'original.

On traverse le Bosphore? Ou pas.

Je l'ai eu sur la main et sur touche. Je me suis penché dessus et ai trouvé pas mal ce coté un peu poudré sucré mais sans excès calorique, cette douceur, cette rondeur, puis me suis encore penché en me disant... Et puis finalement, non. Je n'avais pas envie de me pencher en fait. J'avais juste envie d'aimer ce parfum parce qu'il est signé d'une marque que j'adore et qu'il a bonne presse alors qu'en réalité, je le trouve sans intérêt. Je ne le trouve pas exactement raté, non, vraiment, ce n'est pas ça, juste banal et franchement pas indispensable au catalogue de l'Artisan. Oui, je peux lui trouver des qualités à ce parfum agréable et confortable, je veux même bien le trouver réussi, mais ces qualités, on les retrouve ailleurs, dans d'autres parfums, plus éclatantes et mieux exprimées; du coup, ce parfum ne me fait pas envie, n'apporterait rien à ma collection. Parfait en revanche pour qui ne s’intéresserait pas vraiment au parfum, n'en porterait qu'un pour compléter son allure, de façon très sociale pour plaire à l'entourage? Peut-être, mais pourquoi courir dans une boutique de l'Artisan pour ça? Franchement, le premier Guerlain grande diffusion fait aussi bien et même mieux avec l'avantage d'être beaucoup plus simple à se procurer... Ici, il y a bien une certaine richesse mais qui tourne plus à la confusion qu'autre chose, j'aurais pu aimer cette Traversée si elle avait été plus lisible. C'est possible aussi que je n'arrive pas à entrer dans sa complexité, mais au final, j'aurais l'impression de perdre mon temps à essayer.

Tout ça m'a fait penser à Allure que j’avais tellement envie d'aimer aussi  parce que c'était signé Chanel et que je n'avais jamais été déçu, que Coco et Égoïste était si bien réussi etc. Le concept me plaisait. Le parfum, je suis allé jusqu'à l'acheter avant de réaliser qu'en fait, je le trouvais bien fait dans un genre banal que je n’appréciais pas et ne voulais surtout pas porter, finissant par le détester franchement.

Résultat, je me suis rendu compte à temps que je n'allais pas traverser le Bosphore et qu'ainsi, je trouverais le parfum agréable sur d'autres en me protégeant de sa banalité qui mettrait les parfums plus splendides de ma collection en valeur. Mais je regrette quand même qu'il soit sorti, qu'il y ait trop de sortie maison d'ailleurs, faisant le bonheur de la presse, parler de l'Artisan, mais n'apportant pas grand chose. Pourquoi cette accélération des lancements partout? Pourquoi ne pas comprendre que tous les jus sortis des labos ne méritent pas d'être exploités? Dans Le cas de la Traversée du Bosphore, je ne peux m'empêcher de penser qu'il n'est pas forcément bon que le nez soit à la tête de la marque, ai un trop grand pouvoir de décision, comme Elléna chez Hermès qui nous sort aussi tout ce qu'il a essayé... Non, le moindre exercice ne mérite pas la commercialisation. Si le mainstream n'ose pas et nous sort des clones à la pelle, les niches osent trop, prises d'un délire créatif qui semble estimer que toute création vaut d'être montrée. Je l'ai déjà dit, mais je suis saoulé, lassé.


La traversée du Bosphore, Bertrand Duchaufour pour L'Artisan Parfumeur, 2010

jeudi 23 décembre 2010

shopping de Noël et bilan de l'année écoulée

Je dois être un emmerdeur fini. Aujourd'hui, je me suis fait traîner dans les magasin, enfin, peut-être pas traîner étant donner que j'adore ça, y compris en période hystérique de veille de fêtes, pour me faire offrir un cadeau de Noël. et je n'avais envie de rien, nous sommes rentrés bredouilles, ce qui d'habitude me désole amplement et est même chez moi un signe de dépression. Mais là, RIEN!  Zéro envie aussi bien à la parfumerie que chez Hermès, chose que je n'aurais jamais cru dire mais pourtant vraie: même chez Hermès, je n'avais envie absolument de rien
C'est une sorte d'écoeurement qui me prend après des habitudes d'hyperconsomation, trop plein de plus en plus fréquent qui finira peut-être par me rendre raisonnable, ce que mon banquier n'avait jamais pu obtenir de moi.

Peut-être suis-je rattraper par cet air du temps qui veut consommer moins et consommer mieux, un air du temps plus à la morosité crisèsque qu'à l'euphorie d'une bourse à la hausse... Aller savoir. Mais c'est assez bienvenu puisque ça permet de faire des petits bilans et des petites remises en causes. Et j'ai fait mon petit bilan parfum de l'année, bilan soldé par beaucoup trop d'achats et fort peu de port parce qu'il faut bien dire que finalement, ce sont toujours les deux ou trois même que je porte: mes Chanels chéris plus que tout autre et quelques grands classiques vieillot dont je n'arrive pas à me lasser bien qu'ils soient généralement extrêmement sages.

Cette années, il y eu aussi:

-Des coups de coeur durables généralement parmi les vieux Guerlain mais surtout les créations de l'Artisan Parfumeur et d'Annick Goutal, finalement mes deux maisons préférées qui ne me lassent jamais, un intérêt marqué pour Comme des Garçons qui me semble bien intéressant au delà de ce que la provocation parfois un  pourrait laisser penser.

-Une petite découverte à la limite de la déconvenue: moi et Lutens, nous ne nous aimons définitivement pas. Certes, ses parfums frôle parfois le sublime, ce que je ne discutent pas, mais ils ne sont tout simplement pas pour moi, provocant parfois une sensation de nausée à force de devenir sirupeux sur moi.

-Un agacement vis-à-vis des Éditions de Parfums Frédéric Malle que je suis bien en peine d'expliquer. Les tarifs? Un peu surfaits à mon goût, ce qui fait que comme pas mal de maison actuelle, je refuse de trop m’intéresser à la marque dont au total je crois n’apprécier que quelques références. J'avoue que le parfum de Thérèse, Lipstick Rose et Lys Méditerranée pourrait me pousser au crime... Au moins, même si les prix sont parfois excessifs Chez Malle, on a de la qualité et de la créativité ce qui est loin d'être le cas dans bon nombre de lignes nouvellement créées qui n'ont de luxueux que les prix.

-Des déceptions en chaîne dans les lancements:
A commencer par Bleu le nouveau masculin de Chanel, vague sent bon sans personnalité qu'on serait bien bête de payer chez Chanel quand on peu se l'offrir chez Monoprix. Parfois, après Bleu et la reformulation de Pour Monsieur, je me dis que j'ai du mérite à encore aimer Chanel. Je dois être un vieux sentimental dans le fond.
Le Lutens Bas de Soie: joli mais surtout variation sur le N°19, moins doux, mais pas meilleur.
Le parfum Mais on Martin Margiela pourtant intéressant sur papier mais pas tant que ça dans la réalité. Disons que c'est un demi échec.
Belle d'Opium le grand mensonge: rien d'Opium et rien de beau dans ce flacon.
Beauty de Calvin Klein: la quintessence du parfum actuel: tellement lissé qu'on trouve que oui, ce n'est pas désagréable, que ça sent le parfum mais qu'on enregistre rien tellement ça manque de personnalité. Très représentatif d'une époque qui mets des célébrités sur tous les abribus mais se voit obligée de noter le nom de la dite star quelque part sur l'affiche parce que personne ne la reconnaît plus à force de Photoshop, Botox and C°
Du Bling Bling prétentieux: Guilty by Gucci, Fan di Fendi et surtout notre chérie assumée Lady Million qui fait passer la Rolex de Sarkozy pour une marque de bon goût. Tout ça bien lourd, bien écoeurant et curieusement fondu dans la masse. A son époque Poison incarnait un mauvais goût prétentieux et flagrant mais au moins, il avait le mérite d'une forme originale...
Un Love Chloé qui nous fait le coup du Dove devenu parfum chic pour les gens qui aiment transporter avec eux l'odeur de leur salle de bain... Dans le même genre, très cosmétique, il y a aussi l'Amande Persane de Roger & Gallet: jolie note d'amande poudrée destinée à être déclinée dans une gamme bien-être franchement agréable, pas chère, pas la moins créative des sorties de l'année, qui vaut le détour parce qu'elle n'est pas chère et permet de se faire joliment plaisir. Et au nez elle a vraiment une belle qualité, surtout en version lait et crème, qui la met sur le même pied que des créations plus snobs d'une parfumerie "sélective" qui l'est de moins en moins sélective. Son seul handicap, c'est de ne pas être vendue assez cher mais ce n'est pas moi qui vais m'en plaindre. (à découvrir!)
Du Flanker à la pelle, bien sûr. Tellement qu'on ne parvient plus à suivre et qu'on se demande parfois ce qu'on est exactement en train d'acheter. Certains ont des noms tellement à rallonge qu'ils ne doivent être disponible qu'en flacon MaxiSize, je suppose.
ETC

Pas une grande année, même si j'admets  volontiers


samedi 18 décembre 2010

Plaisirs d’hiver...

L'hiver, ce n'est pas mon truc, je vis fenêtre closes, rideaux tirés, refusant de voir la neige qui s'accumule dehors. Un des bonheur de la saison, c'est de pouvoir retrouver ma bougie parfumée préférée, celle de l'Artisan Parfumeur: Jacinthe et feu de bois. C'est tout le charme d'un printemps précoce qu'elle me donne, ce dont j'ai grand besoin, avec sa bonne odeur de jacinthe bleue, forcée, entre verdeur et sucre, sur fond de bûche qui crépite dans l'âtre que je n'ai pourtant pas. C'est mon must, mon fétiche, mon bonheur, mon réconfort. Mais pas mon seul plaisir...


La saison des fêtes se prêtant bien aux réceptions, échange de cadeaux, je n'hésite pas lorsque je le peux à offrir la bougie assortie à l'un de mes parfums. C'est assez facile chez Goutal ou Penhalgon's mais peut parfois se faire dans d'autre marque. une occasion à saisir pour laisser un peu de sa présence chez des amis...

Quand je reçois, ce qui est rare, ou égoïstement tout seul pour moi, ce qui est fréquent et encore meilleur!, je joue sur les mariages d'odeur entre mon parfum et celui de ma maison en assortissant les senteurs. En prenant l'un ou l'autre composant de mon parfum et en le mettant en valeur dans ma maison. Cela peut-être ma note préférée ou l'une ou l'autre plus cachée dans le parfum mais pourtant bien présente. il me semble de cette façon faire osmose avec mon petit nid.

Pour les fans d'iris poudré, j'aime particulièrement Fleur de Geisha du Palais des thés, un mélange fleur de cerisier et iris poudré très réussi à découvrir si on aime l'Iris, parfait avec un thé à la fleur de cerisier. Goûté très chic en perspective. à assortir à Iris Silver Mist de Lutens, l'infusion d'Iris de Prada, ou l'Hiris d'Hermès. Craquage complet en association avec Lipstick Rose des éd. F. Malle.

Pas excessivement onéreuse et joliment réussie: Jasmin de Rituals qui siéra comme accompagnante au N°5, à Joy et à la plupart des grands classiques contenant un accord jasmin. Mais une bougie Jasmin fonctionne aussi très bien avec l'Heure Bleue par exemple. Plus chic et plus chère, il y a la bougie Jasmin de Diptyque. Avec les fleurs, c'est assez facile. Pas la peine de trop développer. 

Un petit coup de coeur cette année pour moi qui aime la poudre: la ligne Amande Persane de Roger & Gallet qui comporte aussi une bougie parfaite pour mettre en valeur toute les nuance de poudre: le Bois Farine de l'Artisan s'impose, mais c'est intéressant aussi avec le Flower by Kenzo ou le Rive Gauchede Saint Laurent.  Encore mieux les poudrés vanillé comme Shalimar et Habanita qui deviennent irrésistibles. Dans le même genre, beaucoup plus élaborée il y a la bougie John Galliano pour Diptyque qui prouve que le chérie des diorettes sait réussir un parfum finalement. Mais cette bougie la est tellement belle dans son ambiance Shalimar moins la vanille que ce serait dommage de na pas la jouer en solo.

Et si c'est l'Orient qui vous parfume? Direction Goutal et sa Boîte à Epices  totalement irrésistible.

projet de Viollet-le Duc
Pour le jour de Noël: par pitié épargnez-moi les mélanges convenus de cannelle et oranges confites et osez l'ambiance mystique: Spiritus Sancti des Cires Trudons qui joue la partition vieille église complète: fumée de l'encens dansant dans la lueur des cierges (un vrai encens résine, pas le petit bâtonnet mesquin) avec dans le lointain l'odeur du banc ciré et celle de la vieille pierre un peu humide. Le genre de parfum dont Viollet -le-Duc rêvait probablement.

vendredi 17 décembre 2010

Sécrétions pas si Magnifiques....

J'aime bien l'avant-garde et le concept d'odeur plus que de parfum, c'est pourquoi malgré mon coté très "grande bourgeoise" olfactif, j’apprécie beaucoup Comme des Garçons en parfums alors qu'en terme de vêtements, je suis plus réservé: le concept tombe mal sur moi et je ne sais pas le porter autrement que "chiffon mal coupé" ce que je regrette amèrement, j'adorerais faire partie de l’intelligentsia austère du concept au chic codé pour initié.

Etat Libre d'Orange me laisse assez sceptique bien que j'apprécie la démarche de renouvellement par dynamitage intérieur et humour mais, simplement, j'ai tendance à ne voir souvent que des parfums relativement classiques plutôt mal exécuté même si certains ne sont pas sans évocations plaisantes. Putain des Palaces est une odeur de vamp classique, plutôt bâclée, Vraie Blonde voudrait renouveler en rendant hommage aux aldéhydes et à Marilyn mais est tout juste plat et acceptable comme bain mousse etc. J'avoue que Charogne ne me plait pas vraiment mais propose quelque chose d’intéressant, un semblant de piste bien que le coté "explorons le coté sombre" me paraisse un peu surfait. Etc. 

Sécrétions Magnifiques va un peu plus loin et semble vouloir battre la Marque de Rei Kawakubo sur son propre terrain en osant l'odeur et annonce ce qu'il y a de pire: sang, salive, sperme... La provocation étant habituelle chez ELO, on ne s'attend pas forcément au pire. Peut-être à tort cette fois...

Le parfum démarre sur une note métallique intense et glacée qui évoque le goût du métal en bouche, peut-être le sang, effectivement mais avec toute la barre métallique qui l'a fait couler... Et cette barre de métal, il semble que l'on doive la lécher et la savourer pendant des heures aussi pénible que ça puisse être. On pourra reprocher bien des choses à Sécrétions, mais pas de manquer de tenue ou de sillage. Juste quand j'étais sur le point de craquer et envisageais la douche comme remède est apparu le "fond" sale qui ne m'a pas particulièrement évoquer la plongée dans un slip usagé barbouillé de sperme comme l’intitulé, la publicité et la ravissante étiquette collée sur le flacon pouvaient le laisser présager mais je n'en ai pas soupiré d'aise pour autant: ce que j'ai découvert ne valait pas mieux, n'étant pas plus propre ou appétissant, juste moins sexuel puisque sous ce métal qui n'en finissait pas est finalement apparu ce qui m'a évoqué la chaussure pourrie, trop portée par un pied trop sujet à la transpiration. 
J'avoue que ce coté sordide brut de décoffrage m'a un peu laissé dans le doute une fois de plus. Bien sûr, l'idée de départ est intéressante mais en même temps, quoi de vraiment neuf au pays du sent bon? La note métallique, on la perçoit depuis longtemps depuis Calandre il me semble.  Très présente et reconnaissable, je pense à Odeur 71 de Comme des, justement, ou elle est entourée, réchauffée par des comparses aussi étranges qu'elle, poussières, plastiques qui évoquent le bureau et le site industriel  dans une version portable et assez séduisante pour l'entourage. Le fond sale? Mais il me semble que c'est l'un des pilier de la parfumerie française la plus classique, perceptible dans mon cher N°5, dans Shalimar ou Jicky et... et... et... (liste sans fin) Je ne dirais pas que Sécrétions manque d'enrobage, c'est juste qu'il n'a pas de construction, tout simplement et que l'idée amusante de départ tourne court parce qu'Antoine Lie n'a pas crée un parfum, juste assemblé une note de tête envahissante et une note de fond repoussante en oubliant que pour être délicieuses elles devaient faire un bon mariage. Et c'est vraiment cette incomplétude qui me dérange. J'aurais tant aimé être bousculé par quelque chose qui serait une vraie oeuvre pas juste une piste, une idée de... Un parfum sorti trop tôt et qui se serait plus justement appelé "éjaculation précoce" comme souvent chez ELO?

Détat Libre d'Orange, j'ai envie de dire en citant Shakespeare "beaucoup de bruit pour rien" mais ce serait un peu injuste. "Beaucoup de bruit pour pas grand chose" est non seulement plus fair play, mais plus exact. Je trouve qu'il faut laisser une chance à la marque: après tout Guerlain par rapport au nombre de produits lancés sur le marché depuis sa création ne compte qu'un petit nombre d' oeuvres capitales! Et ELO essaye vraiment de faire quelque chose de diffèrent. Si simplement, ils délaissaient un peu les effets d'annonce au profit d'une vraie créativité, d'un véritable travail sur le parfum.

Sécrétions Magnifiques, Antoine Lie pour Etat Libre d'Orange, 2006

mardi 14 décembre 2010

retour aux classiques

J'ai beau sentir, tester, essayer, j'en reviens toujours à Chanel et à ses vieux parfums chiffrés, ceux du vivant de Mademoiselle, les premiers, les magnifiques et novateurs N°5 et N°22. Et je ne me remets pas qu'avec une formule identiques on obtienne deux parfums si différents: attaques d'aldéhydes, une fleur en majesté (Jasmin 5/ rose 22) et ses suivantes, un fond sensuel propre (plus savonneux pour le 5 plus poudré pour le 22), mais malgré tout, deux senteurs qui ont fort peu à voir, dont je ne sait laquelle je préfère. Les deux sont à plusieurs facettes, considérablement changeants mais c'est un peu difficile de comparer tant le N°5 a été décliné dans des versions alcooliques ou non. Je l'ai déjà dit, l'extrait a ma faveur ainsi que l'eau de toilette, les autres versions me semblant un peu plus plates même si elle sont brillamment réussies comme l'Eau Première. 

David Hamilton pour Chanel
C'est vrai qu'il valait mieux en sacrifier un et que la forme 5 était peut-être plus unique parce que plus abstraite. Oui, laisser le 22 dans l'ombre était une bonne décision qui en évitant la concurrence interne sur le même terrain a fait du N°5 une poule aux oeufs d'or. Grâce à cette discrétion des autres parfums, le 5 a pu devenir un mythe absolu, le pilier de l'empire sur lequel on a veillé jalousement, le ménageant, le préservant. Trop de parfums Chanel vanté à longueur de publicités auraient pu mener à sa disparition en le vieillissant, le démodant. C'est bon qu'il soit toujours là mais quel plaisir quand même de pouvoir à coté de son éclat sombre se plonger dans la complexité blanche et lumineuse de son petit frère dont je me demande s'il n'est pas encore plus riche, plus variable sur la peau, plus enchanteur car plus aristocratique, un peu hautain même, et plus romantique. Plus exclusif aussi, mais tout snobisme mis à part, la disponibilité du N°5 partout dans le monde à quelque chose de merveilleusement rassurant: savoir que quoi qu'il arrive, il y en a une bouteille à portée de la main fait du bien.

Comme c'est bon quand on est à bout de retrouver ces nonagénaires coriaces qui ont su refuser les concessions, de se dire quand on désespère de la direction que prennent parfois les choses. Bourgeois et rétrograde, moi? Oui, et j'assume.

lundi 13 décembre 2010

Goûter chez Gauguin

Il y a des parfums à coté desquels on passe parce que ce n'est pas le bon moment, exactement comme on passe à coté de certains livres. J'ai lu la Princesse de Clèves trop jeune, ou trop romantique: elle m'énervait, je ne lui voyais aucune noblesse, juste de la bêtise. Pour Timbuktu, je suis incapable de dire ce qui s'est passé, mais l'autre jour, je l'ai recroisé pour la Xème fois et ce fut la révélation...


J'ai été projeté dans un décor exotique à la Gauguin ou j'ai goûté un encens-fruit incroyablement juteux et frais, d'habitude, je mange proprement, mais cette fois ça dégoulinait sur mon menton... Vous ne saviez pas que l'encens était un fruit? Moi non plus, je l'avoue. Merci à l'Artisan Parfumeur de me l'avoir révéler. Autre surprise, cet encens m'était servi par M. Vétiver. D'habitude, j'ai du mal avec lui, il me donne l'impression que je vais subir un sermon en raison de mon incroyable futilité mais dans ce décor de vacances paradisiaque, il était détendu et rieur, drôle, et je me suis rendu compte que finalement, on pouvait s'entendre et s'amuser lui et moi.

D'habitude, je ne suis pas trop porté sur l'exotisme que je trouve souvent forcé, comme ces décor hôtels construits à la chaîne, faussement typique, sans risque pour le touriste qui n'y est jamais vraiment dépaysé, sans âme. Avec ce parfum, j'ai été conquis, je ne sais pas s'il est vraiment plus authentique, mais tout d'un coup, j'y étais. Transporté. Dépaysé. Incroyablement bien. 

Tant qu'il y aura des parfums comme celui-là, je pourrai rester optimiste.

Timbuktu, Bertrand Duchaufour pour L'Artisan Parfumeur, 2004

samedi 11 décembre 2010

Dovima et les éléphants

Dovima photographiée par Avedon en 1955 dans une robe de Saint Laurent pour Dior
Y a t'il autre chose à dire que "Parfait!" ?

Savoir Vivre et Parfum de Thérèse

"Je n’ai plus RIEN à me mettre"

La phrase la plus répétée au monde, véritable mantra dit et redit devant des penderies vomissant des flots de vêtements qu’elles ne peuvent contenir tant il y en a, ce qui dans mon cas ne contredit nullement l’affirmation, mes penderies étant vraiment très petites. Cette petite phrase aussi indissociable de ma vie que la sonate de Vinteuil des amours de Swann et Odette, je la dit aussi devant mes flacons de parfums pourtant nombreux, pourtant probablement trop nombreux. (estimation au-delà de 30 se rapprochant dangereusement vite des 40) 

Le premier souci de tout élégant et de toute élégante, c’est d’adapter sa tenue à l’heure, au lieu et à l’occasion, ce qui de nos jours est grandement facilité par un assouplissement de l’étiquette puisque dans le vie de tous les jours, nous pouvons pratiquement passer la journée entière dans une seule tenue avec quelques légères modifications d’accessoires pour passer de la coolitude absolue au chic discret d’autant que le un peu négligé, un peu trop relax est totalement admis et généralement mieux vu que d’en faire un peu trop.
Curieusement, alors qu’en termes de vêtements beaucoup de gens ont des traces d’un certains savoir vivre formaliste hérité des années 1950, lorsque le chapitre senteurs est abordé, plus personne ne semble avoir la notion de ce qui se fait et de ce qui ne se fait pas et chacun de trouver absolument normal d’imposer à son entourage un seul et même parfum du matin au soir  avec pour seule variation imposée que « ça doit être plus frai en été, hein! »

Là, je bloque, je cale et je dis non, car en vérité je vous le dit il n’est pas permis à qui veut se gagner le paradis du glamour de saturer les transport en commun dès 7 heures du matin des effluves d’Angel, et je vous le dis aussi, il n’est pas charitable non plus de gâcher le petit déjeuner familiale en y apparaissant revêtu€ de Musc Ravageur qui jamais ne porta aussi bien son non. Je suis le premier à prôner le mélange des genres et à conseiller de jouer le contraste: tenue de pin up + parfum innocent, cuir de motard + fougère classique de gendre idéal, etc.  Sans ce genre de mélange, le parfum parfait ^peut même devenir franchement ennuyeux, attendu, voir vulgaire.

D’après moi, il vaut toujours mieux viser un peu plus bas avec le parfum. Tenue cool: parfum un peu moins cool. Tenus sexy: parfum un peu moins sexy. Etc. histoire de ne pas s’enfermer dans un premier degré plat et d’avoir quelque chose à raconter, une petite surprise en réserve, c’est l’option la plus sure même si effectivement, une petite surenchère de type pétasserie peut se révéler amusante et démontrer qu’on a de l’humour tout en constituant une prise de risque plus grande. (penser que vos contemporain ont de l’humour ou de la cervelle est en soi une prise de risque importante, avis perso!)

Et l’heure du jour?
Et bien oui, il faut en tenir compte, de même que la robe longue ne se porte pas chez le boulanger aux aurores à l’exception d’un trip Breakfast at Tiffany’s, on ne sort pas l’armada bien lourde des orientaux. Plus le jour avance, plus le parfum peut être sophistiqué et capiteux, c’est une question de bon sens.  Oui, c’est un peu rétro comme conception, mais essayer et vous verrez que vos parfums préférés auront BEAUCOUP plus de succès En plus, c’est une bonne excuse pour allez chercher celui (ou ceux) qui vous manque (nt)

Le matin et la journée au bureau, les hespéridés, les floraux épicées légers, les verts sont les plus faciles à porter et les plus agréables pour l’entourage immédiat. D’après le magasine Allure, ce sont aussi ceux qui vous feront paraître quelques années et quelques kilos de moins. Oui, ce genre de réflexion ne fait pas très sérieux à priori, mais ça fonctionne: imaginez une femme entre deux âges, un peu dodue, embaumant L’Air du Temps ou Angel et demandez-vous si le ressenti est le même: il y a fort à parier que la réponse sera non.

À partir de midi,  je trouve les floraux plus capiteux, les épicés, les boisés parfaits et je réserve les choses franchement capiteuses et orientales pour la fin de la journée. Méfiance en cas de restaurants: on évite de faire concurrence au plats! L’après-midi s’accommode assez bien des fruités modernes que je n’aime pas trop à force de les sentir un peu partout. Quelque soit l’heure, évitons par pitié tout ce qui dépasse le statut d’eau Fraîche lorsque l’heure est au sport: une partie de tennis disputée dans une atmosphère Opium-Shalimar est hautement ridicule!

Agne Moorehead
Oui, ça implique de prendre beaucoup de douches, option peu réaliste, ou de passer beaucoup de temps à ne porter que les parfums du matin… Un très bon truc: le parfum « à l’ancienne » celui qui évolue beaucoup. Et pour comprendre ce que j’entends par là, aller vite vous asperger du Parfum de Thérèse, l’une des plus belle chose actuellement en vente en ce moment  qui est une démonstration magistrale de ce qu’est un parfum qui évolue dans le temps, contrairement à ces choses monolithiques et sans intérêt qui encombrent les linéaires de parfumeries. Tout commence par un accorde agrume-fleur qui rappelle l’Eau Sauvage et se termine sur un accord de Prune fleurie-Cuir  boisé qui rappelle Mitsouko et Femme. Savoir comment on passe de l’un à l’autre est un secret alchimique impénétrable, un vraie belle énigme insolvable, d’autant que du début à la fin, le parfum reste une merveille d’harmonie. Oui, c’est une prouesse que ce parfum riche et complexe, un numéro de haute voltige plein de brillant et de virtuosité, un tour de passe-passe tellement bien maitrisé qu‘il en semble facile, mais c’est aussi quelque chose de très touchant, avec une vraie belle personnalité à laquelle on peut s’attacher. C’était le parfum que Roudnitska avait crée pour sa femme. Elle avait bien de la chance, c’est exactement le genre de chose qu’on imagine porté par une femme de parfumeur. Le parfum de Thérèse est un voyage à une époque glorieuse de la parfumerie, une époque ou la maison Dior tenait le haut du pavé,  une époque que je regrette beaucoup.  Ce parfum doit être senti au moins une fois pour ne pas mourir idiot. Et je ne dis pas ça de beaucoup.

Le parfum de Thérèse, Edmond Roudnitska aux Editions de parfums Fréderic Malle, 2000.

mercredi 8 décembre 2010

à la niche?

Le commentaire de Thierry à propos de (untitled) m’a un peu forcé à m’interroger sur le concept de niche qui me semble de plus en plus flou, tant les deux types de parfumeries tendent à se rejoindre. Qu’es-ce qui fait qu’un parfum relève du mainstream pur et dur ou de la niche élitiste ?

L’argent qui est derrière ? Probablement pas, de plus en plus de « petites » marques considérées traditionnellement comme « de niche » appartiennent désormais à de grands groupes à l’assise solide quand elles ne sont pas nées en leur sein. De même certaines séries « exclusives » qui naissent dans de prestigieuses maisons, ayant pignon sur rue, comme les exclusifs Chanel, ou les heures Cartier, qui bénéficient des campagnes de publicité de la marque même si on évite soigneusement de les mettre en scène pour leur préserver un coté secret d’initiés. La distribution ? Ne pas être dans la première parfumerie venue ? Quid de Lutens qui se retrouve dans chez Séphora, y compris les éditions limitées en excursion hors des Salons….

Finalement, je ne vois pas beaucoup de critères objectifs, ça se passe plutôt dans l’idée, l’ambiance générale à ce qu’il me semble.

Une volonté d’oser la création, avec un vrai parti pris plutôt que s’aligner sur des tests consommateurs. La qualité privilégiée. Une communication différente, plus direct à travers les échantillons, un réseau de boutiques propres avec des vendeurs qui connaissent le produits, ou des multimarques qui n’essayent pas de présenter tout en même temps parce que plus serait forcément mieux, etc. La rareté vient naturellement… Effectivement, il y a un coté segmentant : la niche n’est pas pour tout le monde. Dans l’absolu, on sent que chacune vise son propre public, ses fans, une partie faible de la population, mais qui est beaucoup plus fidèle à la marque parce qu’elle s’y retrouve.

Oui, souvent, ce sont de petites marques parce que ceux qui ont des moyens préfèrent la jouer safe ayant plus à perdre en cas d’échec et pouvant se permettre de soigner la publicité. Quand on manque de moyen, il vaut mieux être audacieux, seul le produit peut convaincre. En même temps, combien maintenant peuvent enfin s’offrir de jolies vitrines via le net ? C’était plus difficile il y a 20 ou 30 ans pour Goutal et Diptyque que pour les nouveaux venus.

Je ne peux pas m’empêcher de penser aussi que ce marché là est saturé aussi. Il y a presqu’autant de lancement de niche que de mainstream. Les marques pullulent et ceux qui sont établis sortent des créations à tour de bras. Là aussi, j’ai envie de dire que c’est trop. J’en ai assez des variations sur … qui finissent par se ressembler plus ou moins. Chacun apporte sa pierre à l’édifice, mais une construction trop ambitieuse s’écroule. C’est bien de pouvoir choisir entre X variations sur l’ambre. Mais le résultat est qu’on ne sait plus choisir, que tout se ressemble quand même un peu. Tous les défauts du mainstream, finalement. En disant ça, je pense surtout à ces monomatières dont on nous a un peu saturés ces derniers temps puisque ça avait si bien réussi à Lutens…

Les maisons vraiment intéressantes, il n’y en a pas tellement : celles qui se sont établies dans la durée, les valeurs sûres. Quant aux autres, il faut leur laisser le temps d’exprimer une vision, une cohérence, mais elles sont si nombreuses qu’il risque d’y avoir peu de survivantes et que ce ne seront pas forcément les plus intéressantes, peut-être celles qui comme la Maison Margiela justement auront eu la chance d’avoir un grand groupe derrière elle. Même si je ne suis pas fan d’(untitled) je trouve que oui, il peut postuler dans le rayon niche, qu’il peut être le premier d’une histoire intéressante et j’aime mieux le voir en niche qu’en mainstream parce que là au moins il rencontrera peut-être un public et il aura peut-être des petits frères plus convaincants au lieu de sombrer immédiatement comme ce serait le cas chez Séphora, au détriment de choses plus belles, probablement, mais ça me choque moins que la ligne exclusive de Tom Ford ou la résurrection de Grossmith qui ont pour vision unique le luxe et les prix qui vont avec. J’aime le luxe, mais le luxe, c’est bien autre chose que des matières onéreuses et le sentiment de faire partie des happy few.

Globalement, l’offre est évidement bien plus tentante et plus propre à satisfaire le client du coté des niche, y compris le client lambda qui ne s’y trompe pas forcément lors de tests à l’aveugle, mais à ce rythme là, pour combien de temps encore ? Avant que la surenchère n’ai mené cette économie parallèle à être un clone de l’autre ?

vendredi 3 décembre 2010

(sans titre)

Connaissez-vous le quartier Dansaert? C’est LE quartier modeux flamand de Bruxelles, là ou Margiela est un dieu vivant, là ou il est de bon ton d’être minimaliste ou conceptuel, d’avoir le teint pâle, le cheveux lisse et tiré, les vêtement noirs et créateurs dont seuls les initiés remarqueront la coupe savante, l’originalité réelle derrière l’apparente simplicité. Autre détail important: se prendre au sérieux et avoir l'air sérieux.

Dans les boutiques, j’ai toujours besoin de m’accrocher aux portants à l’instant de découvrir le prix tant ça semble excessif: un T-shirt en coton lacéré vaut-il vraiment 600€? Un costume vieilli  dans un esprit dépôt-vente chic vaut-il vraiment 3000€? J’ai parfois envie de dire que parfois, le T-shirt, je peux le lacérer moi-même et le costume, aller vraiment l’acheter dans une friperie sauf que dans la friperie, il fait beaucoup plus cheap que dans la boutique et pas tant envie que ça finalement.  De toutes les façons possibles et imaginables, je n’aurai jamais le cheveux lisse. 

Le quartier Dansaert devrait embaumer (Untitled) le parfum de la Maison Martin Margiela.
Un parfum qui sur papier à tout pour me séduire: Galbanum plus encens, c’est un peu tout ce que j’aime. Sauf que...

Les deux matières sont très fondues: le départ de galbanum est terreux, encensé, mais légèrement et on passe ensuite à l’encens verdi qui reste dans le registre terreux. C’est à peine végétal et pas mystique pour deux sous. Le parfum est austère, quasi monacal. Oui, il colle bien au look du quartier. Discret et assez peu sympathique. Je pourrait l’aimer, sauf que ce n’est pas moi du tout;  un peu trop simple et beaucoup trop austère, le dépouillement est, ici, trop proche de la pauvreté. Comme les modeux  minimaliste flamands, ça me fascine, mais je sais très bien que ce n'est pas moi, je ne suis pas assez sérieux. J'aurais peut-être aimé un peu plus de netteté et un peu moins de terreux, l'ensemble eut été plus accessible. Malheureusement, court encore ce vieux préjugé que dans les belle boutique, il faut que les vendeurs soient désagréables. Les parfums aussi probablement.

Quant au mariage Margiela + l’Oréal, je ne le trouve pas si raté, si contre nature que ça. Certes, on peut se moquer en disant que l’Oréal voulait sa niche, son Comme des Garçons etc. Mais je pense qu’on aurait pu avoir un Eau d’Issey par exemple, créateur inconnu du grand public mais vrai beau jus original qui a fini par être un beau succès. Ce qui fait capoter l’affaire? Je ne sais pas. On dit que le créateur s’est investi et je le crois volontiers, le jus est trop ouvertement « non populaire » même en tablant sur le retour du vert pour être le seul fruit de l’Oréal qui sort là quelque chose d’intéressant avec une vraie qualité comme c’était déjà le cas avec le Wanted de Rubinstein, plus marketé, mais franchement pas mal malgré tout. Ce qui m’intrigue, c’est cet effort sur deux marques qui n’en sont nulle part coté parfum (qui se souvient que Rubinstein a fait des parfums?) alors que Lancôme, figure de proue du luxe made in l’Oréal, tombe dans le grand n’importe quoi depuis quelques années…

J’aurais un peu envie de blâmer la communication: horriblement prétentieuse, prétendant réinventer le parfum, ce dont on en est pourtant loin: original, mais pas exactement révolutionnaire pont de vue odeur, coté nom et flacon, c'est très banal aussi. des (untitled) comme titre, ça court les musées, les fioles de pharmacie, ça existe un peu partout depuis que Chanel l'a fait en 1921.   Pas de quoi jouer la carte du snobisme et de l’exclusivité avec cet aplomb incroyable… 

Les marques dites de niche que j'aime ont plutôt tendance pour celles qui sont de vrais succès à jouer la proximité, la sympathie, la confiance avec le public sur le thème « vous et nous nous sommes sur la même longueur d’ondes »  plus que l’arrogance du « nous allons créer un chef d’œuvre et vous aurez bien de la chance de pouvoir l’acheter. » Parfois ça passe, mais dans le cas de la Maison, ça casse. Finalement, ça colle vraiment bien avec le quartier Dansaert.

Lui trouver un titre n'était pas si compliqué: il suffisait d'aller voir du coté de Shakespeare : "Beaucoup de bruit pour rien"
(untitled),  Daniela  Roche-Andrier pour la Maison Martin Margiela, 2010

mercredi 1 décembre 2010

Décors proustiens

Curieusement, pour quelqu’un qui s’est tant attaché à décrire des maisons et des vêtements, juste les aspects qui l’intéressaient, certes, nous ne sommes pas dans l’inventaire d’huissier, Proust semble avoir été d’après les témoignages assez indiffèrent à son décor, vivant dans des meubles hérités, vieux et laids, et passablement négligé coté vêtements. D’où certaines remarques dans la correspondance entre mère et fils. Voila qui m’intrigue. Une piste de plus à explorer et une bonne raison de relire l’œuvre. Une de plus.

En même temps, il est clair que je ne fais pas avancer l’étude proustienne : je n’ai aucun talent et absolument pas d’acquis… Mais qu’ai-je fait durant mes études ? À part suivre un cours de littérature comparée absolument traumatisant qui commençait par« le livre est un parallélépipède rectangle… »

Effet premier de mon cher Marcel sur le moral : la déprime assurée face à ma propre médiocrité.