lundi 22 août 2011

Eugénie Grandet

On ne lit plus Balzac et c’est bien dommage. J’ai passé toute ma scolarité en l’ignorant absolument comme bon nombre d’autres classiques. Heureusement que j’étais motivé pour les découvrir, d’autant que certains m’ont apporté beaucoup. La Comédie Humaine, je l’ai lue il y a 15 ans, en entier, ce qui ne se fait guère, mais correspondait assez à mes goûts : j’aime les gros volumes et ne déteste rien tant qu’abandonner des personnages que j’ai suivi et aimer. (Je suis un très mauvais client pour la nouvelle.

Eugénie Grandet fait partie des romans qui m’ont beaucoup plu et que je voulais relire. C’est un saisissant portrait de l’avarice, celui du père Grandet qui fait vivre sa maison sous le régime de la parcimonie la plus extrême pour le plaisir d’entasser les millions et de contempler son or. Sa maison ? Une épouse soumise, assujettie jusqu’à l’abêtissement, une bonne dévouée, et une fille, la belle Eugénie, figure même de la pureté, intouchée par le monde, innocente, prise au milieu d’une cour d’intrigant attirés par l’or du père grandet, la courtisant puisqu’elle est l’héritière. C’est un concours de petitesses et de mesquineries que la naïve Eugénie ne peut mal de remarquer.

Arrive de Paris un malheureux cousin, joli garçon aux grâces féminines, aux raffinements impensable pour l’héritière. Et là, bien sûr, le cœur d’Eugénie s’emballe, elle découvre l’amour, ses ravissements, ses tourments. Mais le père Grandet ne veut pas de cette unions, il y aurait trop à perdre. Et les malheurs de s’accumuler sur la tête d’Eugénie. Car le roman est sombre, va jusqu’au sordide, démontrant que la vertu ne paye pas sur cette terre.

J’ai adoré le lire. Il y a des passages somptueux. L’introduction typiquement balzacienne qui décrit la région, la rue, la maison avant d’en venir aux protagonistes et de poser l’intrique. La découverte de l’amour par la jeune fille innocente est un vrai régal, on est heureux de sentir son cœur s’ouvrir, de voir son âme s’élever à la félicité, même si la chute doit n’en être que plus dure. La description de l’avarice du père Grandet est aussi un régal, qui va des plus petites choses aux grands calculs, faisant frémir mais rappelant curieusement certaines habitudes de nos proches. (Ou alors, c’est que vous n’avez pas eu une tante Huguette comme la mienne, aux doigts crochus, traquant la moindre occasion d’épargner trois francs six sous.) Le cynisme de Balzac tempéré par la foi fait merveille dans cette descriptions d’une famille et des ses familiers, tous plus méprisables les uns que les autres, petit milieu mesquin, étriqué ou seul l’argent a de la valeur. Démodé Balzac ? Pas le moins du monde, en quoi ces thèmes seraient-ils vieillis ? Pas un roman joyeux, mais intense, dense, une vraie petite miniature en grisaille sombre sur la petitesse au fin-fond d’une province reculée. J’ai adoré, comme la première fois !


Balzac, Eugénie Grandet, dans la Comédie Humaine, Scènes de la vie de province, 1933

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