Lorsque j’étais jeune, la maison Dior tenait le haut du pavé en termes de luxe et de rêve. L’ombre de Monsieur Dior était encore présente et le patrimoine parfum était intact, Miss Dior et Eau Sauvage en tête, avec encore les anciennes images signées Gruau qui trônaient dans les présentoirs. Serge Lutens venait de partir et Tyen commençait à régner sur le maquillage. Les cosmétiques promettaient des miracles avec Capture, le premier soin aux liposomes. Ça n’a l’air de rien comme ça, mais les liposomes ont fait fantasmer toute une génération…
Et Poison. Poison et sa tubéreuse mariée aux épices et aux fruits rouges. Poison qui a enchanté ou dévasté les années ’80, qui collait tellement bien avec cet esprit du temps tout en épaulettes agressives et lamés or ultra luxueux et un peu toc. Poison qui était trop, tellement bien dans une époque qui aimait l’excès et le prenait très au sérieux. Poison qu’il fallait avoir, qui se mariait si bien avec les maquillages un peu sorcier de cette décade excessive et égoïste.
Et aujourd’hui ? Aujourd’hui, je ne m’approche plus des comptoirs Dior. La magie est partie. La couture a fait défilé des filles qui ressemblent à des caricatures par des travestis singeant la haute couture et les parfums multiplient les flankers qui se vautrent dans la facilité. Du sucre à la pelle. Des matières qui évoquent pauvreté, pas simplicité, et synthèses. On est bien loin de la complexité charmante d’un Miss Dior ou de l’évocation poétique de Diorissimo : Dior parfume la néo-pétasse à grand renfort de calories olfactives. Je ne prétends pas que tout soit raté et je peux trouver du charme à un Hypnotique Poison, simplement, ce genre d’accords assez basique joliment travaillé dans ce cas précis, je trouve que c’est un peu triste quand ça se systématise. En outre, il n’y a plus d’âme, de poésie en dépit des jolis films signés Sofia Coppola. Et je ne parle même pas des affiches pour les soins ornée de la photo de Sharon Stone, qui prétend n’avoir rien fait, mais dont il faut mettre le nom dans les campagnes de pub sinon on ne la reconnaît pas…
Non, Dior, moi, je ne peux plus. Il faut certes évoluer, mais pas comme ça. Coller à son époque, oui. Tirer la qualité vers le bas et gruger le consommateur en lui vendant du mythe et rien d'autre, c'est indigne. D’autant que le patrimoine est nié, évacué, jugé indigne car pas assez rentable. Exploitation du nom, oui, mais l’âme dans tout ça ? C’est un luxe dispensable selon LVMH.
L'évidence de l'élégance a, malheureusement, déserté nombre de créations. Dior, avec son pitre, n'est qu'un symbole extrême, de cette dérive, où luxe est, malheureusement, devenu synonyme de vulgarité.
RépondreSupprimerVotre article, concis, est parfait; une question, toutefois, néo-pétasse n'est-ce pas une tautologie?
Je crois qu'il y a vraiment eu un changement dans la "pétasserie" qui a toujours existé mais est de nos jour célébrée, fêtée, comme si cet état était en soi un but à atteindre alors qu'autrefois, il était de bon ton de railler ce genre d'attitude. (Je pense, peut-être à tort car ma lecture est ancienne, à la Duchesse de Langeais de Balzac, qui se présente en ange, ce que le romancier ne manque de moquer)
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