vendredi 29 juin 2012

VOLU(P)TES


Volutes, le mot enchante, faisant naître en moi des envies de tabac cinématographiques et mystérieuses. Volutes, le nom me donne envie de retourner chez Diptyque, maison un peu boudée depuis quelques temps parce que Duel n'est qu'une fort jolie vanille mais que je ne suis pas amateur du genre et que les sorties suivantes, partaient dans toutes les directions sauf la bonne donnant des parfum confus, comme le parfum à l'adresse de la maison qui a force de vouloir tout évoquer finissait par n'être que désordre, ou des Eaux Roses une peu idiotes, pas forcément déplaisantes d'ailleurs, mais qu'aucune personne sensée ne peut décemment songer à acheter si ce n'est pour le plaisir d'accumuler les flacons marqués Diptyque.

Marilyn Monroe
Volutes chante à mon nez une autre chanson et me réjouit enfin. Des arômes de tabacs en fumée douce et effectivement voluptueuse, un peu foin, un peu vanille, qui se mêlent ensuite à un accord miellé pour un effet de rondeur, de douceur, terriblement séduisant et capiteux. Il possède un charme ambigu, un peu canaille, à la fois énigmatique et sensuel en réussissant à éviter l'écueil du fatal, d'une séduction trop calculée. 

Et surtout, il prend son temps, dans un univers ou tout va vite. Le jeu de mots est facile, mais effectivement, il a quelque chose de la pause cigarette, ce moment pris pour soi, un peu hors du temps où on ne fait rien, ne dit rien, où on prend juste un peu de temps pour soi.

Diptyque renoue avec ce qu'il sait faire à la perfection, l'évocation d'une ambiance, d'un petit univers, d'un moment intime pris sur le vif, qui parle à chacun tout en étant terriblement signé et personnel. Ce parfum-là est un vrai coup de cœur, que je ne porterai certes pas –ma phobie du sucre me l'interdit- mais que j'espère voir porté autour de moi pour pouvoir le sentir souvent… Il est terriblement addictif : je ne cesse de venir le renifler, je lui tourne autour depuis des jours. Le bougre, tenace en plus, refuse de me lâcher. Oui, ce tabac est une drogue d'autant plus terrible qu'elle semble si douce. Seul petite réticence, je crois que je l'aurais encore plus aimé en parfum d'intérieur.

Volutes, Fabrice Pellegrin pour Diptyque, 2012

jeudi 28 juin 2012

Tubéreuse cléopâtresque


La tubéreuse by Killian est solaire, lamée, dorée, terriblement coco, d'un luxe écrasant et somptueux. Elle me fait penser à Elizabeth Taylor dans le Cléopâtre de Mankiewicz. De l'argent dépenser à foison, qui se voit sur l'écran, une Egypte splendide et un peu kitsch, mais, surtout, une Elizabeth rayonnante, fascinante, si évidemment amoureuse de Burton, belle à se damner sous un maquillage qui enlaidirait des filles à peine jolies, et toujours un peu hystérique. Voilà tout Beyond Love : un parfum coûteux, mais où on sent la belle matière à plein nez, un parfum dans lequel se vautrer pour une débauche luxueuse et indécente. Ce n'est pas la plus artistique, la plus distinguées des tubéreuses, mais l'argent est là et, pour une fois, a été dépensé à bon escient.

J'avoue ne pas être fan du genre. J'ai toujours préféré Claudette Colbert dans le Cléopâtre de Cecil B de Mille, dominant l'Égypte art déco d'Erté avec son assurance de petite secrétaire arriviste, sans scrupule, sans complexe, terriblement moderne et charmeuse. N'empêche, de temps en temps, une petite dose d'Elizabeth Taylor ou de Beyond Love, c'est rudement bon. Insortable cependant, tant le parfum est connoté prostituée de haut-vol. À réserver pour traîner à la maison dans une robe de chambre-kimono chamarrée.


Beyond Love, Calice Becker, by Kilian, 2007

lundi 25 juin 2012

de l’église au cimetière


Encens et Lavande fut un énorme coup de cœur, la seule lavande que j'ai jamais portée avec plaisir. Le parfum me plongeait immédiatement dans une église ou je contemplais les volutes bleutée de la fumée d'encens qui tournoyait dans la lumière des vitraux, rafraichie par l'odeur des champs de lavande tout proches qui entrait par la porte ouverte derrière moi. Moment de contemplation, de solitude, de prière et de dialogue intérieur. J'aimais ce parfum qui pour certains évoquait un peu trop les messes de leur enfance. Je me lovais dedans comme dans un plaid, douillet, à l'abri du monde.

Aujourd'hui, les choses ont bien changé. Encens et Lavande évoque pour commencer un salon de barbier, provincial, désuet, plutôt cheap. L'encens est une discrète et froide note au départ, presqu'imperceptible, qui monte peu à peu, se réchauffe, finissant par évoquer le souvenir du parfum que je connus jadis. Mon curé chez le barbier, ça fait nettement moins rêver. Un parfum à envoyer au cimetière.

Encens et Lavande, Christopher Sheldrake pour Serge Lutens, Salons du Palais Royal, 1996

dimanche 24 juin 2012

Housewife of the year (1978)


Estée Lauder avait conquis le monde avec ses crèmes et des parfums de jet-setteuses ou de vamps hollywoodiennes, mais elle allait conquérir l'Amérique puritaine en 1978 en lui donnant ce qui allait être sa référence en termes de parfum religieusement sain et propre : White Linen. Les aldéhydes dominent, crissants, immaculés, mariés à un bouquet floral pour un effet linge propre d'une fraîcheur qui confine à la maniaquerie hygiéniste. White Linen est parfait pour l'office du dimanche : parfum de bourgeoise impeccable dans ses ensembles amidonnés, il m'a toujours donné l'impression de porter des gants de coton blanc.

À redécouvrir car les classiques de Lauder sont tous de grands parfums. Beaucoup de parfums modernes à effet propre et lessiviel lui doivent beaucoup sans forcément l'égaler.

White Linen, Sophia Grojsman pour Estée Lauder 1978

vendredi 22 juin 2012

Divine Guerlain


L'expression « petite robe noire » évoque un certain minimalisme, le « petit télégraphiste sous-alimenté » de Chanel. On avance le nez benoitement vers le flacon de la dernière sortie mainstream de Guerlain et on recule vivement devant l'attaque de sucre: en fait d'élégance sobre, on trouve un gavage de confiture aux fruits rouges, une arme de destruction massive visant les diabétiques. Tous les autres souffriront de dommages collatéraux en se prenant au moins trois kilos. Tout cela n'est pas bien grave, cette petite robe noire existe probablement en taille XXL.

La sortie de La Petite Robe Noire ressemble à un scénario de John Waters. C'est drôle, effrayant et de très mauvais goût. Divine aurait pu y tenir le premier rôle avec son talent habituel.

La petite robe noire, Thierry Wasser pour Guerlain, 2012

jeudi 21 juin 2012

c’est l’été


louise brooks
Enfin... 

L'été, la chaleur, le soleil et cette paresse, cette langueur qui s'empare de moi, me pousse à rechercher l'ombre, à m'étendre sur la méridienne ou le lit, mollement, comme si soudainement mon corps était de coton et non plus de chair et d'os. Laissez-moi, couché, avec un livre à la main, rêvasser, oublier la chaleur qui m'accable. N'attendez rien de moi, ne me parlez même pas. Je serai de nouveau à vous quand l'été sera terminé. Je reviendrai à moi avec l'agitation, l'effervescence de la rentrée. D'ici là, je ne veux rien, rien que la paix et une figue juteuse. La figue, l'un des rares fruits qui me séduise par ses facettes changeantes, tour à tour vertes, sucrée, laiteuses…

Je ne le cite pas toute, juste mes deux préférées, qui ne sont pas les plus pures, car la simple matière ne me plait pas tant que cela. Pour commencer, le Jardin en Méditerranée de Jean-Claude Ellena pour Hermès (2003), la plus élégante des figues, celle qui se pare de fleurs, se savoure en bouquet piqué d'agrume, se nuance de bois et d'eau, toute en transparences, jolie citadine qui porte des sandales lamée or quand les autres sont en espadrilles. A l'opposé, Ninfeo Mio d'Isabelle Doyen et Camille Goutal pour la maison Goutal (2010) s'avance échevelée, pieds nus, dans le jardin des Hespérides pour trouver la fraîcheur à l'ombre verte des grands arbres.

Donnez-moi l'été et ces deux parfums et je suis si bien…

mardi 19 juin 2012

nudité


Helmut Berger par Helmut Newton
Ces dernier temps, il m'arrive de plus en plus de sortir sans parfum. Et je me sens en situation de nudité, comme dans ces rêves étranges que nous avons tous déjà fait ou nous sommes nu en rue, très mal à l'aise, mais ou personne autour de nous ne semble rien remarquer. Sortir sans parfum m'a toujours fait cet effet. C'était parfois l'occasion de filer à la parfumerie pour acheter quelque chose, mais souvent, j'avais tout ce qu'il fallait avec moi dans mon sac. Ces temps-ci, ce genre de choses m'arrive de plus en plus et de façon très volontaire. Je trouve agréable ces jours « sans » qui me permettent de retrouver mieux le parfum, qui débanalisent le geste, le réflexe.

lundi 18 juin 2012

vintage


J'ai une fascination pour le vintage. Ou plutôt pour la fascination pour le vintage, y compris la mienne. J'ai vraiment du mal à comprendre cet engouement pour une époque révolue, une époque qui souvent, regardait elle-même en arrière…

Les années '50 sont pour moi un paroxysme de sexisme conventionnel et bourgeois qui replace la femme dans son rôle de potiches après trois décennies de libération plus ou moins souhaitées. Alors que la technique la libère de l'esclavage domestique, qu'elle a enfin le droit de vote, la femme s'enferme dans son rôle de potiche, reflet brillant du statut social de son époux, dans une mode qui regarde vers le second empire et (re)met à l'honneur les inconfortables corsets, les gaines, etc. De nouveau, les femmes sont « féminines » et les hommes « masculins » de façon caricaturale mais esthétique. 

Pourquoi faut-il que cela nous fasse à nouveau rêver ? Et pourquoi faut-il qu'à nouveau on nous propose des gaines en boutique ?

jeudi 14 juin 2012

Merde, c’est l’été !


Ava Gardner
L'été est là, bientôt, très bientôt, et tous pensent déjà à nous vendre un parfum nouveau pour célébrer l'occasion. Cette année, j'ai l'impression qu'on va avoir droit aux notes solaires en surdosages : tiaré, monoï et surtout salicylates à foison. C'est facile et ça permet de faire un flanker d'été à peu de frais. Tout le monde semble s'y coller et pourquoi pas ? Après tout, c'est très vendeur puisque ça réussi l'exploit d'être régressif et exotique. On mêle le souvenir d'enfance, de la mère qui nous enduit d'huile solaire au camping des flots bleus, et la carte postale Tahiti-Île Maurice-etc. avec plage de sable blond, lagon bleu intense, touché d'un peu de sensualité avec l'effet peau nue.

 

L'été va être solaire, parce que c'est la crise et qu'il faut dépayser et rassurer à moindres frais. L'été va être solaire merci à Davidoff (Cool Water Sensual for Women) Nuxe (Parfum Prodigieux) Yves Rocher (Monoï, l'Eau des Vahinés) et tous les autres… L'été va être solaire et je n'aime pas ça. Nous ne sommes pas tous des cagoles rêvant de descendre sur St-Tropez, il y en a parmi nous à qui le cliché de la vahiné, hibiscus derrière l'oreille et soutien-gorge en noix de coco, soulève un peu le cœur. La sensualité « regarde, je me touche » faussement innocente « mais c'est pour me mettre de l'huile solaire » me donne envie de pouffer. De vomir aussi parce que c'est franchement écœurant, terriblement gras, presque poisseux et que le registre est assez limité quand il est interprété au premier degré. Franchement, si cette mode s'impose en été, je serai content de voir revenir l'hiver…

 

Mais je confesse être assez troublé par Songes de Goutal, que je continue de trouvé importable pour moi, après l'avoir senti en sillage sur une amie. De loin, je peux trouver ce genre de parfum séduisant. Le test sur peau ne passe pas du tout. Je suis plus Balbec que St-Tropez, probablement. Quoique, j'aime assez l'Ylang en sourdine. Et je ne déteste pas le santal qui peut aussi entrer dans la catégorie. Pour un effet peau bronzée, j'irai naturellement vers Bois des Îles (chanel) beaucoup plus civilisé et citadin que les parfums-crème solaire ou même vers le Santal Blanc de Lutens qui m'a toujours évoqué une peau bronzée. C'est tout de suite moins cheap. Mais en fait, le bronzage et les vahinés, ce n'est pas mon truc, je préfère faire voyager mon univers et mon petit monde avec moi : mes livres, mes parfums qui voyagent avec moi. Je n'essaye pas de faire couleur locale ailleurs, ni de faire exotique chez moi. C'est probablement pour les mêmes raisons que je fais un peu la gueule aux oud et à l'orientalisme à tout va. Je peux trouver ça super beau, mais pas pour moi. 

samedi 9 juin 2012

simplicité


L'été est là, ou presque, peu importe ce que je peux bien voir derrière mes fenêtres. Et l'été, c'est le moment ou jamais de se faire plaisirs, des plaisirs simples et joyeux. Du coup, je jette, une fois de plus, mon dévolu sur la Verveine de l'Occitane. Rien d'extraordinaire, juste la senteur de la verveine citronnée, incroyablement fraîche, une senteur botanique qui semble venir tout droit du jardin. C'est à la fois pétillant et très fin.

En fait, je ne craque pas sur l'eau de toilette en elle-même mais sur la ligne qui est très réussie. Comme d'autre « petites » maisons, l'Occitane semble miser autant, si pas plus, sur les dérivés que sur les produits alcooliques et nous concocte donc des senteurs qui s'adaptent parfaitement aux supports tels que les laits pour le corps, etc. C'est vraiment un bonheur en été de s'inonder de cette fraîcheur à la tombée de la nuit lorsque l'air est lourd, orageux. Faites-vous plaisir aussi et faites en profiter toute la famille, surtout les enfants, histoire de leur faire de jolis souvenirs parfumés pour plus tard !

Verveine, l'Occitane, 2003

vendredi 8 juin 2012

good bye, Serge !


Je portais à la Nuit l'autre jour, somptueux jasmin de tigre (de salon ?) en chaleur et je le trouvais toujours aussi magnifique avec son départ vert et son fond animal, riche, terriblement sexuel mais j'étais mal à l'aise avec lui, comme je l'étais avec la plupart des Lutens depuis quelques temps. Alors que je n'avais conservé que les floraux, délaissant les orientaux, je me sus aperçu que c'est toute la signature maison qui me déplaisait maintenant, après que je l'ai tant aimée. J'ai commencé à porter du Lutens avec Féminité du Bois, dès sa sortie, et j'adorais son austérité voluptueuse, de même que j'ai aimé beaucoup des parfums qui ont suivi, parfum denses, riches, intenses qui aujourd'hui me semble toujours aussi beaux mais dont je perçois tout le côté sombre, chargé de drame. Et c'est quelque chose qui me pèse. Je réalise que je les ai portés à un moment, à des moments de ma vie ou je pouvais m'identifier à ça, jouer ce rôle un peu vénéneux. C'était des moments où j'avais besoin de cette ombre, de cette force inconsciente qui m'accompagnait et me portait. Et subitement, elle est devenue un poids, une croix, comme ces vieilles rancœurs qu'on traîne parfois trop longtemps avec soi, quelque chose que je dois laisser derrière pour m'alléger. Encore une maison à laquelle je dis adieu ? Décidément, je n'en finis pas et je terminerai peut-être mes jours en eau de cologne toute simple. (Signée Ellena quand même, j'espère !)

mardi 5 juin 2012

Sexy (ou pas?)


La question la plus bête qui court sur les forums: “quel parfums est sexy ? » Ou ses variantes « quel parfum plait/attire les hommes ? » etc.… Le genre de chose que je trouve particulièrement absurde ou énervante même si c’est soigneusement entretenu par le discours publicitaire qui joue quasi exclusivement sur ce registre de la séduction, et un peu sur le registre du statut social… Comme si en 2012, rien d’autre ne pouvait nous intéresser, comme si nous étions complètement décérébrés. Au moins quand Chanel utilisait sa propre image pour vanter ses parfums, elle proposait un modèle autre, séduisant, certes, élégant aussi, mais surtout libre, émancipé, entreprenant. De nos jours, c’est potiche à tout va… et il y a des connes pour aspirer à ça ! Pour rêver devant la pub « j’adore » ou une greluche, ultra-photoshoppée, ne rêve que de défiler en portant de belles robes. Oui, ça m’énerve un peu parce que c’est toujours éternellement le même registre de la séduction. Comme s’il n’y avait que ça dans la vie, du cliché rétro mal vieilli à décliner à l’infini. Avoir de l’humour, lire un livre, aller au musée, mais pourquoi faire tout ça ? Basiquement, on ne voudrait que coucher. Suis-je le seul à avoir envie de hurler ? 


En outre, je trouve ça un peu pathétique comme idée : séduire grâce à son parfum. Je pense soudain à Estée Lauder qui expliquait que si on complimentait une femme à propos de sa robe ou de son maquillage, c’est que la femme en question avait tout faux ! Que ce qu’il fallait que les gens voient, c’était elle. Pareil avec le parfum, j’aime autant qu’on tombe follement en amour de moi et pas du parfum, même magnifique que j’ai généreusement vaporisé. Je ne dis pas qu’un parfum n’aide pas dans la vie, mais ce n’est pas en fonction de l’effet qu’il fait aux autres, c’est en fonction de l’effet qu’il a sur moi : je suis bien avec mon parfum, comme avec tout le reste, donc je suis magnifique ! Quand à allumer, la plus verte des promenades à la campagne peut le faire. Vous n’auriez pas cru que l’odeur de potager de l’Eau de Campagne (Sisley) ou celle de gazon frais de l’Eau de Camille puisse être un accessoire dangereusement torride ? Essayez : « Viens sentir mon parfum, j’ai l’impression de m’être rouler nu€ dans l’herbe » et venez me parler des résultats. Quand Marilyn faisait une réponse spirituelle à une question idiote « je ne dors qu’avec quelques gouttes de N°5 », ce qui est séduisant, c’est Marilyn toute nue qui sent bon, pas particulièrement le N°5. Avec de l’eau de cologne Mont-Saint-Michel, l’effet eut été à peu près le même. Alors par pitié qu'on cesse un peu de s'exciter sur la formule magique qui ferait que....