samedi 20 août 2011

La goutte qui fait déborder le flacon ?

Dans un couple, il y a des moments où on se rend compte que ça ne va plus très fort. Qu’on a changé. Ou que l’autre a changé. Et qu’il est peut-être temps d’en finir. J’en suis à ce stade de ma relation avec Chanel. Je suis toujours autant en amour avec les anciens mais les  modernes me déroutent de plus en plus et je ne parviens plus à me dire que je n’achète que ceux qui ont été conçus du vivant de Mademoiselle parce que bon.

Tout a commencé avec l’eau de parfum N°5 qui d’après moi était un sacré ratage, un lifting totalement raté. Ensuite, il y a eu les flankers inutiles : une eau de toilette concentrée pour Monsieur, un Egoïste Platinum d’autant plus ridicule qu’on ne massacre pas un nom aussi génialement trouvé que celui-là. Il y eu le cas Allure et ses multiples incarnations toutes d’après moi plus dispensables les unes que les autres. Bien faites, mais j’attendais plus de Chanel qu’un simple bien. Un parfum Chanel, pour moi, c’était autre chose, une affirmation catégorique, de mauvaise foi même, pas juste une odeur agréable qui dit je suis propre, je sens bon… Coco Mademoiselle : LE flanker minable qui défigurait la seule vraie réussite de Polge chez Chanel et qui en plus lançait l’une des plus infâmes modes du XXIème siècle : les néo-chypres. Les exclusifs : un vrai scandale : Les classiques déjà existants vendu plus cher sans raison et des nouveautés bien faites inaccessibles pour beaucoup alors que la moindre parfumerie de province est encombrée de flankers à la pelle. (Il y a bien longtemps que j’ai renoncé à suivre l’état des déclinaisons de la version masculine d’Allure) Bleu : le parfum aux jolies matières pour un résultat au-delà du déjà-vu: THE parfum générique par excellence, l’absence totale de signature… Et maintenant, le N°19 Poudré. L’erreur de trop. Une révision du N°19 à pleurer puisqu’on en retire tout ce qui en fait l’intérêt, certes, c’est plus facile à porter, avec une absence complète de sillage et même pas l’argument parfum de peau puisqu’il n’y a pas la moindre tenue.

Et là, je me demande s’il ne faut pas rompre définitivement et se tourner vers d’autres cieux, implorer d’autres divinités. En même temps, je n’ai pas envie de tomber dans le travers du tout à la niche, je crois encore aux jolies surprises de la grande diffusion. Après tout, Prada, sans prétendre innover complètement a réussi à faire de jolis parfums, de bonne qualité, terriblement élégant, avec une vraie personnalité même si elle ne prétend pas à une originalité qui ne correspondrait pas au personnage néo-classique de la Pradette. Il y a aussi Mugler par exemple qui innove avec qualité. Léger détail mais qui a son importance, j’ai beau trouver bien fait et réussi tous les lancements de Mugler, il n’y en a aucun que j’aime et que je juge portable.

Et puis bon, il y a Lutens. Je n’aime pas tout, loin de là, moi qui boude l’Orient et ne supporte l’alimentaire. Mais Bas de Soie et l’un des plus beau dérivé du N°19. Quelques floraux sont magnifiques, les boisés sublimes et il y a Iris Silver Mist, l’iris en majesté, celui qui mérite qu’on se mette à genoux, celui dont on ne devrait prononcer le nom sans se signer…

Et Goutal. Goutal dont j’aime à peu près tout le catalogue. Goutal et sa version bouleversante du N°19 : l’Heure Exquise. Goutal qui fait des parfums avec un vrai caractère, tellement qu’on identifie un soliflore signé Goutal parmi ses semblables. Goutal qui souffre d’un léger handicap : pas un seul parfum vraiment bitchy… Des tubéreuses passionnées, une Petite Chérie qui est un peu peste, mais pas de garce attitude. Peut-être bien mon parfum chéri, mais je ne l’aime guère celui-là. Comme me l’a fait remarquer très intelligemment Mr Phoebus, il y a le Néroli qui est assez crissant, à la limite du cassant qui peut faire office de. Le coté fruité juteux-craquant est presqu’acide. La faute au petit grain qui lance le parfum de façon presque verte ? Mais voilà bien la plus fraîche des fleurs d’oranger dont la tenue se révèle étonnante pour un parfum aussi frais. (Il remplace très bien Cristalle de Chanel par exemple, bien qu’il soit assez diffèrent…)
Bien sûr, il n’y a pas vraiment d’abstraction chez Annick Goutal, on est dans le figuratif, le poétique. La maison aurait presque l’air nunuche et mièvre pourtant, elle possède derrière ses comptoirs girly, un peu trop Marie-Antoinette, des petits bijoux intenses, même lorsqu’ils sont sans ombres. C’est peut-être logique qu’il n’y ai pas de parfum spécial garce frigide attitude. Mais en même temps, décréter que la vie est belle, poétique, ça n’a rien d’effrayant.

Voilà, j’ai un peu l’impression d’être un apostat. En même temps, on ne peut dire non plus que je vende mon âme au diable. (Bien que Lutens sente parfois le souffre !) En fait pour l’instant, j’ai des réserves à terminer, alors, c’est assez facile de dire « Moi, Chanel, plus jamais… » Mais quand ma dernière goutte de N°5 sera partie ? Quand il n’y aura plus de bois des Îles ? Plus de 19 ? 

Illustrations: mes propres flacons à moi.

5 commentaires:

  1. C'est marrant parce que je partage à 100% ton avis, mais je ne peux pas l'exprimer comme toi. Parce que je n'ai encore jamais eu de Chanel.... Et je sais que je vais finir par y passer, donc je ne peux pas me détourner prématurément d'une marque dont les anciens lancements m'attirent inexorablement (c'est juste une question de temps, c'est dans mes gènes, j'ai une allure de chanelophile qui ne demande qu'à s'épanouir). Je sais que c'est par là que je me dirige en faisant mon petit bonhomme de chemin perfumista, et je n'ai plus qu'à espérer que pendant la durée du trajet, les nouveaux parfums lancés entre temps sauront renouer avec l'esprit de la marque. Juste pour que je ne me sente pas coupable de payer un N*19 dont l'argent servira à faire la promotion d'un flanker de Bleu...
    Phoebus.

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  2. Mon Pauvre Phoebus,
    La promo d'un flanker de Bleu (enfin, un... 15, ciel, marin, clair, nuit, roi, des mers du sud and co) mais si ça se trouve the real N°19 sera passé exclusif, ou quasi introuvable caché derrière les poster géant de l'usurpateur.
    D’ailleurs, en passant, même le flacon, il est moche: un flacon Chanel, c'est avec une étiquette blanche toute simple et des lettre noires et puis c'est tout! (début de la fin: l'étiquette Coco et ses dorures!)

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  4. J'ai beaucoup réfléchi ces temps-ci parce que je suis espagnole et que j'habite dans un pays chaud où le fait de porter un parfum au sillage disons "important" est considéré comme un manque du respect d'autrui.
    A mon avis,le problème est, sans aucun doute, que les gens n'ont vraiment pas acquis (car personne ne leur a appris) la culture de l'extrait de parfum, c'est ce manque de "culture de l'extrait" qui fait que les parfums deviennent proprets, qui commence par une question de dosage, car il faut les vaporiser, si on vaporise on met beaucoup de jus et si on met les jus en grande quantité il faut qu'ils soient considérés portables et peu envahissants.
    La maison Sisley par exemple, (qui jusqu'en 2009 était une maison sérieuse) a cessé de produire des flacons ressourçables.
    A mon avis la seule chose que l'on puisse faire c'est d'acheter toujours des extraits et c'est exactement ce que je vais faire: acheter le N19 en extrait et me refuser à parler à qui que se soit de ce dernier N19 apparemment poudré qui vraiment ne sert à rien.
    Très cordialement

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  5. Disons déjà qu'un parfum à sillage est encore plus envahissant avec la chaleur qui le "dope" littéralement. Petit truc perso pour les parfums envahissant: je les porte bas: sous le vêtement, au niveau du ventre et de la chute de rein, voire au creux du genoux. La perception en est totalement changée...
    Et c'est vrai que l'extrait qui s'étire et se prélasse sur la peau, c'est tout autre chose qu'une eau de toilette ou qu'une eau de parfum. Malheureusement, c'est une concentration qui tend à disparaître: Elle n'est souvent plus produite et quand c'est le cas, elle est quasi introuvable. Sauf pour deux références comme N°5 et Shalimar qui sont bien distribuée et se vendent assez bien sous cette forme, je pense. Les gens on peur du prix pour une si petite quantité etc... Mais quand on y a goûter, je parie, vizcondesadesaintluc, que vous serez d'accord avec moi, on ne revient plus en arrière.

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