On ne parle pas beaucoup de la crise dans les blogs parfums,
ça fait mauvais genre, ce n’est ni luxueux, ni glamour. Parfois, en passant, on
évoque la chute des ventes du bout des lèvres et dans l’angoisse… Pourtant, c’est
difficile de ne pas voir, depuis 2008, ces images de gens dans la rue qui
protestent, soumis aux privations de l’austérité, emportés par le naufrage de l’économie.
Difficile d’oublier la Grèce, l’Espagne, les fermetures d’entreprises au bas de
notre porte, la paupérisation croissante, la déprime généralisée, le désarroi
qui s’expose chaque jour au JT, les SDF qui semblent de plus en plus nombreux,
les expulsions… Ce n’est ni joyeux, ni glamour, mais c’est pourtant bien là, c’est
notre quotidien, un quotidien qui semble être bien installé dans nos vie, même
si on nous promettait que ça passerait vite, qu’on ne le sentirait pas.
J’ai envie de me demander si ça change mes habitudes, celles
des autres, durablement, peut-être pour un mieux, qui sait ? Pour l’industrie,
j’ai vraiment l’impression que ça ne change rien, qu’il n’y a aucune remise en
question : on continue les mêmes recettes de l’égérie et de la campagne de
pub avec des jus qui sont de plus en plus à la mode, flattant le goût du public
sans lui proposer d’alternative. On croit voir un serpent qui se mord la queue,
un cercle vicieux, vous aimez le fruit, je vais vous en donner encore plus,
pour que vous aimiez encore plus ça ! Le seul critère objectif du consommateur
semblant être « Est-ce que ça tient bien ? Est-ce que ça tient
longtemps ? » Pourtant, il serait peut-être bon pour l’industrie de
se pencher sur les courants qui traverse la société. La Simplicité Volontaire
qui remet notre mode de vie en refusant la surconsommation en marquant
clairement le retour à un mode de vie plus proche de la nature pourrait
être inspirante. Pourtant, non. Il
semble même que l’industrie parfumée prenne le contre-pied en suivant les recommandations de l’IFRA toujours plus de
chimique alors qu’on ne cesse partout de prôner le bio et le naturel…
De plus en plus de gens se tournent vers les classiques et
redécouvrent les anciens via les vintages et pourtant, ça ne semble inspirer
personne…Il suffit de jeter un œil sur les blogs, des sites de partage comme
tumblr pour constater que les images anciennes tournent en boucle, qu’on se passionne
un peu partout pour le rétro, de plus en plus, depuis une dizaine d’années, que
c’est passé du snobisme modasse à la pratique admise de tous, que la nécessité économique
encourage cette attitude ; et pourtant les marques ne valorisent pas le
patrimoine qu'elles ont, elles se contentent de pousser à la nouveauté.
Derniers exemples, les « gardien du temple » du bon goût, de la
tradition et de l’héritage, Chanel et Guerlain, qui vendent des sucraillons en
bon suiveur. À l’opposé, une marque comme Chloé a réussi à faire un carton avec
des parfums faussement rétros. Régressif, autant que le sucre de la petite
enfance, parce qu'ils rappellent la mère, un temps passé et plus heureux. Et
pourtant, cet exemple n’est pas suivi, ni pour le lancement de nouveautés, ni
pour la relance d’anciennes gloires endormies…
La mode, la tendance, ce n’est pas nouveau, mais choisir il
y a une trentaine d’années entre Poison et Paris n’avait pas de sens, on
prenait les deux ou on en crevait d’envie. Choisir entre Lady Million et La Vie
Est Belle, c’est évident pour éviter le double emploi. Ou on va carrément voir
ailleurs pour ne pas faire partie du troupeau. Je trouve ça triste, pour les
créateurs qu’on condamne à dupliquer les mêmes daubes à l’infini, mais je suis
pas certain d’avoir envie que survive une industrie pareille, pas comme ça. Et
le pire, c’est que ça gagne la niche qui pour les grands groupes qui ont le
pouvoir et les finances semble passé de « labo d’idées, sources d’inspiration »
à « pompe à fric » comme une autre. Et vraiment, j’aimerais mieux
voir fermer des maisons auxquelles je suis attaché que les voir se transformer en
« nouveau Lancôme. » Mais je suis peut-être un vieux con.