Le vert tendre des souvenir, pas celui, dur et cassant de la frigidité. Le vert de l'Eau de Campagne (Sisley) et sa ballade au potager. Le vert de l'Eau de Lierre (Diptyque) et sa maison de famille aux murs de pierre humides couverts de végétations. Et l'Eau de Camille d'Annick Goutal, peut-être pour moi le plus intime, le plus madeleine de Proust, le plus personnel, donc le plus émouvant…
Je me moque de savoir qu'il fut créé pour une jeune Camille de huit ans qui voulais retrouver les senteurs du jardin, l'Eau de Camille me parle à moi, de moi, de mes souvenirs de citadin qui sentait aux beau jours l'odeurs des jardins, pelouses fraîchement tondues, seringas capiteux, tout un monde caché par des haies., invisible et présent qui me parle comme les aubépines parlaient à Marcel Proust. Je ne savais pas ce que ces haies, ces jardins me disaient, l'Eau de Camille me le révèle en me les rendant : ils me parlaient de moi, me disaient de revenir, de rester. L'Eau de Camille me rend mon innocence perdue, l'époque où tout était facile, où les été duraient longtemps… Pourtant, il y a des complexités, la promesse des voluptés et des douleurs à venir dans ce parfum que l'on aurait tort de qualifier de facile et de puéril. La douleur des déchirements futurs, l'angoisse de savoir que tout cela ne peut durer, la pensée des adieux, la peur de se retourner et de découvrir les zones d'ombres, la part sombre qui reviendra nous hanter longtemps encore.
Ce qu'une odeur si simple de gazon, de tilleul, de seringa, delierre, peut faire !
L'Eau de Camille, Annick Goutal, 1983.
Hello,
RépondreSupprimerC'est très bien écrit Dau, votre style révèle tous ces sentiments que l'on commence à peine à deviner, souvent par bribes, pendant l'enfance. J'ai grandi en ville et à la campagne, ces impressions diffuses ne m'ont jamais quittée même en plein mois de juillet au milieu des fleurs, des abeilles et des parfums tantôt doux ( le tilleul tant adoré ) tantôt puissants ( la figue ouverte ). Je ne connais pas l'Eau de Camille, je l'ai eu en échantillon je crois mais hélas il s'est perdu avec le temps. l'Eau du Ciel m'évoque assez ce que vous décrivez, mais la sérénité domine, disons que je n'y perçois pas de mélancolie ou de nostalgie à venir, les deux ressentis étant effectivement différents. Là où je perçois de la nostalgie c'est clairement avec Tilleul et d'ailleurs toutes les créations d'Olivia Giacobetti ou presque. J'ai dit une fois que les parfums Annick Goutal me semblaient plus mondains, en réalité ils sont surtout plus détachés des sentiments tristes, plus citadins aussi malgré tout, moins épurés que les créations d'Olivia Giacobetti. Mais c'est vrai que l'univers d'Annick Goutal sait recréer des atmosphères merveilleuses là où Olivia Giacobetti semble puiser à la source sans retouche, en traversant le temps. C'est sans doute ce que me bouleverse, mais les parfums Annick Goutal me touchent aussi beaucoup. L'Eau de Camille ? Oui, elle annonçait bien des douleurs, mais également une superbe continuité.
Merci pour ce très gentil commentaire.
Supprimerà propos de Giacobetti dont j'aime beaucoup le travail, je le trouve nettement moins sentimental et plus cérébral. Avec Giacobetti, nous sommes plus proche de l'Art Pur, parfois beaucoup plus naturaliste d'ailleurs (En Passant), mais qui du coup me parle, non pas moins, mais autrement.
Hello,
RépondreSupprimerMerci à vous Dau ! Oui, vous avez tout à fait raison, Olivia Giacobetti a le don de créer des parfums épurés. Moins sentimental ? Alors peut être plus sensible mine de rien. J'aime les deux encore une fois, en ce moment j'ai envie de porter Petite Chérie ou... Tilleul !